Jugements sur les Évangiles

Les Évangiles, tout comme le reste de la Bible ont été pendant longtemps reconnus comme étant la pure parole de Dieu. Mais force est de constater que l'inspiration uniquement humaine de certains passages n'est pas le fait de Dieu.

Introduction ;

L'Ascension dans les Évangiles : la date de l'Ascension est incertaine ;
A la source des Évangiles : leurs dates de composition et leurs auteurs ;
Que penser des Évangiles : plusieurs avis différents sur les Évangiles.

 Introduction

Les lecteurs potentiels de la Bible, et notamment du Nouveau Testament et des Évangiles peuvent se poser des questions concernant le sens des récits, et le fait qu'il y ait des versions différentes.
Selon R.P. Roguet, auteur de « Initiation à l'Évangile » (Éd. du Seuil, 1973), les nouveaux lecteurs sont embarrassés, décontenancés.

Avant une certaine époque, les gens ne connaissaient que des extraits choisis qui étaient lu lors des messes, ou exposés dans les manuels. La Bible en entier circulait peu.

« Beaucoup de chrétiens ont besoin d'apprendre à lire l'Évangile », rajoute R.P. Roguet.

A l'intérieur des notices des livres religieux, l'on peut lire que les auteurs des textes sont des témoins oculaires, que les textes sont des textes authentiques, et que les récits sont vrais. Mais les manuels spécialisés sont moins affirmatifs à ces sujets.

Peut-on dire que les délais d'écriture après la mort de Jésus étaient très courts ?! A partir d'une tradition orale a été effectuée une première rédaction, mais les remaniements des textes ont été démontrés.

Les dictionnaires disposés en annexes dans les livres religieux reflètent une argumentation apologétique qui n'est pas si saine qu'il puisse paraître.

Le caractère bien souvent captieux des commentaires est totalement consternant.

 Un exemple démonstratif : l'Ascension.

Les Évangiles de Matthieu et de Jean n'en parlent même pas. L'Évangile de Luc présente le jour de l'Ascension le même jour que celui de la Résurrection, mais Luc dans son Acte des Apôtres (dont il est supposé être l'auteur) le désigne comme ayant eu lieu quarante jours plus tard. L'Évangile de Marc parle de l'Ascension, sans préciser de date (dans un final non authentique).
L'Ascension (fête chr.) n'a donc pas de base scripturaire solide. C'est avec une légèreté incroyable que les commentateurs abordent la question : A. Tricot (« Petit Diction. du Nouveau Testament » de la Bible de Crampon, ouvrage de grande diffusion, Éd. Desclée et Cie, 1960) ne consacre pas un article pour l'Ascension. RR. PP. Benoît et Boisnard (Professeurs à l'École Biblique de Jérusalem qui ont écrit « Synopse des quatre Évangiles », Éd. du Cerf, 1972, P. 451-452) qualifient la différence entre l'Évangile et les Actes des Apôtres de Luc d' « artifice littéraire ». R.P. Roguet est le plus courageux : (P. 187) « Ici, comme en beaucoup de cas semblables [à celui de l'Ascension dans les Évangiles ... ] le problème ne semble insoluble que si l'on prend à la lettre matériellement les affirmations de l'Écriture en oubliant leur signification religieuse. Il ne s'agit pas de dissoudre les faits dans un symbolisme inconsistant, mais de rechercher l'intention théologique de ceux qui nous révèlent de mystères, en nous livrant des faits sensibles, des signes appropriés à l'enracinement charnel de notre esprit. » (pour les inconditionnels).

R.P. Kannengiesser (professeur à l'Institut catholique de Paris qui a écrit « Foi en la Résurrection, Résurrection de la foi », Éd. Beauchesne, coll. Le Point Théologique, 1974) témoigne : « Le peuple des fidèles sait à peine qu'une révolution s'est opérée dans les méthodes de l'exégèse biblique depuis l'époque de Pie XII » (qui régna de 1939 à 1958).

« Un renversement des perspectives les plus assurées de la tradition pastorale, écrit l'auteur, se trouve peu ou prou mis en route par cette révolution des méthodes exégétiques. »
« Il ne faut plus prendre au pied de la lettre » les faits rapportés au sujet de Jésus par les Évangiles, « écrits de circonstance » ou « de combat », dont les auteurs « consignent par écrit les traditions de leur communautés sur Jésus ».

Cet explication se place loin des positions traditionnelles, prises encore lors du concile de Vatican II, et reprises par les ouvrages (modernes) de vulgarisation destinés aux fidèles.

Petit à petit, la vérité fait jour.
Il est une vérité que les faits finissent toujours par s'imposer en dépit des résistances de ceux que leur mise en évidence embarrasse, agace ou choque.

 A la source des Évangiles

L'introduction à la T.O.B. et au Nouveau Testament (Éd. du Cerf et les Bergers et les Mages, 1972) faite par plus de cent spécialistes catholiques et protestants rapporte que « Les Évangiles ont été diffusés postérieurement aux oeuvres de Paul (du début du II ème siècle), après 140 exactement. Avant 140, il n'existe en tout cas aucun témoignage selon lequel on aurait connu une collection d'écrits évangéliques. ». Ces écrits étaient terminés en 110.
A. Tricot affirme : « De très bonne heure, dès le début du second siècle, l'usage s'établissait de dire l'Évangile pour désigner les livres que, vers 150, Saint-Justin appelait aussi « Les Mémoires des Apôtres ». ».
Près d'un siècle après la mission de Jésus, les Évangiles forment un tout. Vers 170, ils ont le statut de littérature canonique. Le canon des Évangiles est formé à partir de l'exclusion des documents non reconnus dans la ligne choisie par l'Église. Ces documents seront coupés de la Grande Église qui se libère progressivement de ses attaches juives, ils dépériront très vite en Occident. Mais on suit leurs traces du IIIème au IVème siècle en Orient, en particulier en Palestine, en Arabie, en Transjordanie, en Syrie, en Mésopotamie. Certains seront absorbés par l'Islam, qui en est pour une part l'héritier ; d'autres se rallieront à l'orthodoxie de la Grande Eglise tout en conservant un fond de culture sémitique et quelque chose en persiste dans les Églises d'Éthiopie et de Chaldée.
Les auteurs, des apôtres ? D'après A. Tricot, Matthieu, Marc, Luc auraient écrit leurs Évangiles « avant 70 ». Ce qui est avancé n'est pas acceptable, sauf peut-être pour Marc. Jean vécut jusque l'an 100 ! [et a bien connu Jésus]. Jean l'apôtre n'est pas forcément l'auteur de l'Évangile de Jean. Il n'y a pas eu de témoins oculaires qui soient les auteurs, on ne sait pas. Il existe en effet des contradictions entre les versions de chaque rapporteur.
L'Évangile de Matthieu est une prolongation de l'Ancien Testament, montrant que (T.O.B.) « Jésus accomplit l'histoire d'Israël », avec des citations de l'Ancien Testament montrant Jésus respectueux de la loi juive.
Cet Évangile est en contradiction avec l'Évangile de Luc, concernant la généalogie de Jésus. Cette faute dans la généalogie est passée sous silence par les commentateurs.

 Jugements sur les Évangiles

O. Culmann (auteur de « Le Nouveau Testament », Presses Universitaires de France, 1967) écrit que les Évangélistes n'ont été que les « porte-paroles de la communauté chrétienne primitive qui a fixé la tradition orale. Pendant 30 ou 40 ans, l'Évangile a existé presque exclusivement sous forme orale ; or la tradition orale a transmis surtout des paroles et des récits isolés. Les Évangélistes ont tissé des liens, chacun à sa façon, chacun avec sa personnalité propre et ses préoccupations théologiques particulières, entre les récits et les paroles qu'ils ont reçus de la tradition ambiante. Le groupement des paroles de Jésus, comme l'enchaînement des récits par des formules de liaison assez vagues, telles que : « après cela », « aussitôt », etc., bref le « cadre » des synoptiques sont d'ordre purement littéraire et n'ont pas de fondement historique. ».
« Il faut noter enfin que ce sont les besoins de la prédication, de l'enseignement et du culte, plutôt qu'un intérêt biographique, qui ont guidé la communauté primitive dans la fixation de cette tradition sur la vie de Jésus. Les apôtres illustraient les vérités de la foi qu'ils prêchaient en racontant les évènements de la vie de Jésus, et ce sont leurs sermons qui donnaient lieu à la fixation des récits. Les paroles de Jésus, elles, se sont transmises particulièrement dans l'enseignement catéchétique de l'Église primitive. ».

T.O.B. : Les Évangélistes ont usé de la tradition orale, et des formes écrites diverses pour produire des textes « s'adaptant aux divers milieux, répondant aux besoins des Églises, exprimant une réflexion sur l'Écriture, redressant les erreurs et répliquant même à l'occasion aux arguments des adversaires. Les Évangélistes ont ainsi recueilli et mis par écrit, selon leur perspective propre, ce qui leur était donné par les traditions orales. ».

D'après la T.O.B., les défauts ne sont plus étonnants. On ne peut plus s'en étonner, compte tenu du contexte historique, des communautés différentes qui relatent les faits.

Concile Vatican II (1962-65) : « Il n'échappe à personne qu'entre toutes les Écritures, même celle du Nouveau Testament, les Évangiles possèdent une supériorité méritée, en tant qu'ils constituent le témoignage par excellence sur la vie et l'enseignement du Verbe incarné, notre Sauveur. Toujours et partout l'Église a tenu et tient l'origine apostolique des quatre Évangiles. Ce que les apôtres, en effet, sur l'ordre du Christ, ont prêché, par la suite, eux-mêmes et les hommes de leur entourage nous l'ont, sous l'inspiration divine de l'Esprit, transmis dans des écrits qui sont le fondement de la foi, à savoir l'Évangile Quadriforme, selon Matthieu, Marc, Luc et Jean. ».

« Notre Sainte Mère l'Église a tenu et tient fermement et avec la plus grande constance, que ces quatre Évangiles dont elle affirme sans hésiter l'historicité, transmettent fidèlement ce que Jésus, le fils de Dieu, durant sa vie parmi les hommes, a réellement fait et enseigné pour leur salut éternel, jusqu'au jour où il fut enlevé au ciel ... Les auteurs sacrés composent donc les quatre Evangiles de manière à nous livrer toujours sur Jésus des choses vraies et sincères. ».
Cette déclaration de Vatican II est inconciliable avec l'existence dans les textes de contradictions, et affirmations contraires à la réalité des choses dûment établies.

Le Cardinal Danielou (dans la revue « Études » de décembre 1967) écrivait : « Une vision nouvelle des origines chrétiennes, le judéo-christianisme », reprenant des travaux antérieurs. Il redonne un contexte bien différent de celui qui ressort des exposés destinés à la grande vulgarisation.

Le judéo-christianisme est basé sur l'enseignement de Jésus. La famille de Jésus faisait partie des Judéo-chrétiens. C'était une secte juive, fidèle aux observances et au culte du temple.

Le christianisme d'aujourd'hui, a été institué par Paul vers 70 après J.-C.. Paul était contre la circoncision et les observances juives, telles que le Sabbat, le culte du temple. Il était ouvert aux « Gentils » (les païens). Ce christianisme est apparu entre 70 et 110 après J.-C.. La mise à jour des Évangiles a été faite au moment où il y a eu la guerre juive et la chute de Jérusalem, et qu'il y a affrontement des deux communautés judéo-chrétienne et chrétienne de Paul. D'autres Évangiles, judéo-chrétiens, ont été déclarés apocryphes.
Paul aurait vu Jésus qui lui serait apparu ressuscité à Damas, lui qui ne l'a pas connu de son vivant.


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